Le C.I.L. se réjouit que le Synode ait mis en évidence la nécessité et l’urgence de profondes réformes. Dans notre pays, une grande majorité de catholiques considèrent que s’opposer à des réformes substantielles ôterait son sens à la démarche synodale. Cela ruinerait l’espérance qu’elle a fait naître. IL faut que l’Église procède à de véritables évolutions quant à la manière de décider, d’organiser et d’animer la vie ecclésiale. À ce jour, peu de progrès ont été réalisés au sein de l’Église en termes de coresponsabilité. Des réformes urgentes s’imposent : la récente nomination au Vatican de femmes au sein des dicastères est un pas dans la bonne direction. Tout récemment, en Belgique, la nomination de laïques à des postes-clés de responsabilité est un réel signe d’ouverture.
- À première vue, le ‘Projet de Texte’ des évêques peut paraître vague et manquer de concret.
- La démarche est bonne mais ne va pas assez loin : les propos sont vagues et prudents. Va-t-on réellement arriver un jour à un changement ? En outre, il y manque une parole sur la justice sociale.
- Il manque au projet une dimension essentielle qui fait partie de l’essence même de la doctrine de l’Église en matière d’enseignement social et qui est, plus que jamais, prioritaire. Les chrétien.ne.s doivent témoigner de leur foi dans le monde en étant à l’écoute des plus pauvres et des exclus. S’attaquer résolument aux causes de la pauvreté et de l’exclusion est un devoir absolu pour l’Église. De nombreux membres dont la CSC estiment qu’une réflexion sur la justice sociale accompagnée de propositions d’actions concrètes est un devoir absolu pour l’Église.
- Le texte a un ‘côté flou’ inhérent à une démarche en construction. En même temps, il a de l’audace car le risque d’échouer existe. Ceci donne un souffle, un discernement à saisir, c’est l’œuvre de l’Esprit-Saint. Ajoutons encore ce qui manque : alors que la crise climatique se déploie, Dieu nous appelle à prendre soin de ‘notre maison commune’. Cela signifie aussi que nous devons nous ouvrir à une conversion écologique. Nos communautés doivent réfléchir et agir pour résoudre les causes structurelles des problèmes écologiques en ne laissant personne derrière nous.
- Le texte est ouvert aux évolutions de la société mais il est aussi assez ‘autocentré’. La Commission théologique (CT) de Entraide et Fraternité/Action Vivre Ensemble comprend la nécessité de tenir compte de la diversité au sein de l’Église. Toutes les régions du monde ‘n’avancent’ pas au même rythme. La CT pointe certaines grandes thématiques essentielles manquantes : la pauvreté et l’exclusion ; les questions cruciales concernant l’écologie et la sauvegarde de la terre ; les solidarités nécessaires à une proclamation cohérente de l’Évangile ; les questions contemporaines autour de l’éthique et de la bioéthique –éthique morale et sexuelle- cf. bénédiction des couples irréguliers.
- Un grand contentement se fait entendre de voir les évêques s’intéresser à ce que les gens pensent et vivent : le ‘Projet de texte’ des évêques présente une approche réfléchie et progressive sur des sujets cruciaux pour l’avenir de l’Église dans un contexte moderne. Les thèmes abordés sont d’une pertinence indéniable pour l’Église contemporaine et montrent une volonté d’adapter la mission de l’Église aux défis actuels sans renoncer à ses principes fondamentaux. Les sujets évoqués sont essentiels pour une institution cherchant à rester significative et influente dans un monde qui évolue rapidement. Toutefois, le texte, qui propose des approches pragmatiques et réfléchies pour aborder les défis identifiés, semble cependant manquer de concret dans l’articulation des différentes étapes pour y parvenir.
- Le texte nous montre une démarche d’humilité de la part de l’Église. Ce qui peut y apparaître parfois peu concret nous offre cependant une forme de liberté dans le dialogue. Ce texte pourrait-il, dans ses préoccupations, ajouter un surcroît de légitimité à l’enseignement, en contexte scolaire, de la religion et des faits religieux dans leur ensemble ?
- Un regret demeure : le texte n’offre pas vraiment de perspective pour l’ensemble de la jeunesse dans la mesure où l’éducation des jeunes n’y est pas abordée directement.
A.- Trois priorités théologiques pour le prochain Synode.
En vue d’une consultation limitée pour préparer la prochaine session du Synode, les évêques ont proposé trois priorités à discuter au niveau de l’Église universelle. De nombreux éléments du rapport de synthèse de l’Église belge (2022) ont été débattus à Rome en octobre dernier. Dans la richesse du rapport de synthèse d’octobre 2023, nous nous retrouvons fortement sur de nombreux points. Dans ce qui suit, nous formulons trois priorités qui méritent une attention particulière lors de la réunion du Synode d’octobre 2024.
1.- L’Église en dialogue avec le monde.
Le désir d’une Église plus missionnaire qui vit et partage la joie de l’Évangile se heurte de plein fouet, dans notre contexte, à la question de savoir comment développer une nouvelle dynamique missionnaire. Quelle approche, quel ancrage spirituel, quelle formation sont nécessaires ? Dans le cadre de cette quête générale, nous nous concentrons ici sur un élément essentiel pour nous.
Une Église synodale missionnaire exige un dialogue ouvert qui tienne compte des développements actuels dans le monde qui nous entoure. L’Église ne peut se contenter d’une voie à sens unique pour proclamer la Bonne Nouvelle au monde.
Dans un dialogue ouvert, l’Église écoutera aussi ce que l’évolution des sciences, de la culture et de la société peut lui apprendre.
Cette ouverture ne peut être rejetée comme une « volonté de s’adapter au monde moderne » ou comme un « renoncement à l’identité pour devenir pertinent aux yeux du monde ». Le dialogue ouvert avec le monde est nécessaire à partir de la conviction profonde que l’Esprit de Dieu y est mystérieusement à l’œuvre.
Dans une telle discussion, l’Église peut aussi apprendre des choses. Les évolutions sociétales (en matière de droits de l’homme, de démocratie et de libertés modernes par exemple) incitent également l’Église à revoir et/ou à enrichir certaines de ses positions.
Une conversation ouverte et respectueuse avec le monde contemporain offre à l’Église des opportunités de remettre en question et de renouveler sa propre compréhension de la Bonne Nouvelle.
Nous demandons que la culture synodale de la conversation soit également utilisée pour engager l’Église dans un dialogue avec les développements actuels du monde qui nous entoure. Cela nous aidera à mieux comprendre les signes des temps à la lumière de l’Évangile.
Commentaires du C.I.L.
Dans l’ensemble, les membres du C.I.L. se réjouissent de la volonté, de la part de l’Église, d’une ouverture toujours plus grande au monde. Ils soulignent l’indispensable ancrage dans les Écritures et dans la prière pour aborder ce dialogue ouvert avec le monde.
Le monde, qui est-ce ? Quelle est cette diversité ?
Peut-être serait-il bon de le préciser pour ne pas rester dans un texte de principe.
De même, pourquoi ne pas considérer la pluralité et la diversification ‘des approches, des ancrages spirituels, des formations nécessaires’ plutôt qu’une approche, un ancrage spirituel, une formation?
Dans l’énumération des évolutions sociétales incitant l’Église à enrichir certaines de ses positions, il est bon d’ajouter les causes et les effets du changement climatique, l’attention aux plus pauvres et aux exclus, à l’accroissement des inégalités sociales.
À tous les membres du C.I.L., il paraît également important pour l’Église de maintenir un dialogue œcuménique, un dialogue avec les autres religions et philosophies et, en même temps, de soutenir un dialogue interne avec les personnes qui vivent et célèbrent leur foi différemment.
En effet, quelle place est faite à la diversité au sein de l’Église ?
Ce dialogue ouvert doit se faire aussi dans l’humilité, condition de l’écoute, et dans le respect absolu de l’interlocuteur afin de pouvoir apprendre de l’autre. Dans l’ouverture au monde, l’Église doit se décentrer, être crédible dans ce mouvement vers autrui.
Il serait bon, afin de ne pas pratiquer ‘une langue de bois’,
de préciser le sens ou d’éclairer l’intention de certaines expressions spécifiques
telles que «volonté de s’adapter au monde moderne»
et «renoncement à l’identité pour devenir pertinent aux yeux du monde ».
À qui s’adressent ces expressions ?
De même, la répétition de cette belle notion de ‘culture synodale de la conversation’ pourrait, si elle n’est pas illustrée,
devenir jargonnante pour toute personne extérieure à cette culture.
Enfin, pour avoir un dialogue réel avec le monde,
notre Église doit se positionner humblement et en vérité
sur ‘qui elle est’ dans toute sa complexité,
ne pas cacher ‘ses fautes’ ou erreurs au risque de rendre creux, par incohérence ou par hypocrisie, l’incroyable message d’espérance et de vie qu’est l’Évangile.
Remarque : bannir une expression qui risque bien de n’être plus aussi facilement acceptée
par la société actuelle : « les droits de l’homme » au profit des « droits humains » !
2.- ‘En conversation’ pour une Tradition dynamique.
Dans le cadre du dialogue entre Église et monde, l’Église devrait avoir le courage de mettre sa Tradition/ses traditions en conversation avec les connaissances actuelles de la recherche théologique, philosophique et scientifique. La Tradition/les traditions ne doivent pas être abordées de manière statique mais dynamique. Après tout, elles sont le fruit de nombreux développements et continuent d’évoluer.
La question centrale dans tout cela est la suivante : la tradition/les traditions de l’Église représentent-elles la meilleure interprétation possible des Écritures pour les peuples d’aujourd’hui ? Quelle image de l’homme, de Dieu et du monde se dégage de la lecture des Écritures en conversation avec la théologie, la philosophie et les sciences contemporaines ?
Cette réflexion est primordiale pour la compréhension de l’anthropologie chrétienne biblique et de la doctrine du salut. Elle peut également avoir des implications importantes pour répondre à de nombreuses questions éthiques.
Nous ne demandons pas que cette réflexion soit approfondie pendant le synode. Nous demandons que le synode décrive la Tradition/les traditions de notre Église comme étant dynamiques et en développement constant. Nous aimerions voir grandir une décision selon laquelle une conversation ouverte avec les développements de la théologie, de la philosophie et des sciences est nécessaire et devrait être organisée.
Commentaires du C.I.L.
Les membres du C.I.L. apprécient le fait d’associer ‘la Tradition’ et ‘les traditions’
et y voient un signe d’ouverture vers la réalité de l’institution.
En effet, la Tradition n’est pas ‘un poids de vérités’… elle reste intrinsèquement ‘inaccessible’
car on ne peut jamais la comprendre totalement,
tandis que les ‘traditions’ sont ce que les communautés en comprennent et vivent.
Suggestion est faite d’ajouter la notion de ’INTERROGER’ l’anthropologie chrétienne en même temps que de la comprendre… Cette réflexion est primordiale pour répondre non seulement à des questions éthiques mais également sociétales avec des retombées sur l’expérience vécue de la foi
(par exemple : la justice sociale).
Par contre, la phrase « cette réflexion ne soit pas approfondie pendant le synode » est incompréhensible dans le ‘Projet de texte’.
Qu’en est-il ? Faut-il supprimer cette phrase étonnante?
Les ARTS devraient également compter dans la « conversation ouverte
avec les développements de la théologie, de la philosophie et des sciences ».
Même remarque que pour le précédent paragraphe, il convient ici de ne pas dire « quelle image de ‘l’homme’ » mais « quelle image de la personne humaine ou de la personne», par exemple.
3.- L’unité dans la diversité.
Le dialogue avec le monde (1) et la conversation entre la Tradition/les traditions de l’Église et la théologie, la philosophie et les sciences (2) peuvent-ils encore être identiques en tout pour la totalité de l’Église universelle ?
Le thème de « l’unité dans la diversité » dans la vie de l’Église doit faire l’objet d’une réflexion et d’une clarification plus approfondies. Qu’exige un consensus universel durable ou croissant dans la communauté catholique ? Concrètement, qu’est-ce qui peut être décidé par un évêque, une conférence des évêques ou une assemblée continentale des évêques ?
Un fonctionnement plus synodal, avec une implication croissante de nombreuses personnes dans les délibérations et les prises de décision, exige une plus grande reconnaissance de la diversité légitime.
Lorsque les évêques (assemblées) se voient confier davantage de responsabilités dans certains domaines, il est également nécessaire de déterminer comment et devant qui ils doivent rendre compte de leurs politiques. Comment cela peut-il se concrétiser ? Outre la relation des évêques avec le métropolite et l’évêque de Rome, on pourrait également envisager des entretiens de fonctionnement et d’évaluation avec les évêques. Qui mènerait ces entretiens avec eux ? Comment un évêque (ou une assemblée d’évêques) peut-il rendre compte de son travail auprès du presbytère et du peuple de Dieu ?
Nous demandons que se concrétise la décentralisation de certaines décisions dans l’Église qui permette une coopération dans l’unité avec une diversité plus légitime. Nous demandons que se concrétise la « responsabilité » des évêques dans une Église synodale.
De manière générale, nous demandons que des propositions de texte sur les priorités susmentionnées soient présentées au prochain Synode d’octobre en vue d’une réflexion et d’une discussion argumentées.
Commentaires du C.I.L.
Le C.I.L. voit dans cette demande une ouverture majeure car l’Église est Une
mais pas la même partout et cela, jusqu’au sein de nos communautés marquées par l’interculturalité.
Cependant l’expression « l’unité dans la diversité » demande une explication nuancée.
Comment dire aujourd’hui, comment énoncer ‘l’unité de l’Église’ ? C’est une vraie question.
Dans ce sens, en début de paragraphe, « Le dialogue avec le monde et la conversation (…) peuvent-ils encore être identiques en tout pour la totalité de l’Église universelle ? »
ne convient-il pas d’y ajouter «pour la totalité de l’Église universelle et au sein de nos communautés marquées par l’interculturalité. » ?
La diversité des cultures demande des réponses différentes :
une nécessaire décentralisation, l’importance du local (l’évêque et ses conseils),
il est urgent de viser à un rééquilibrage entre unité et universalité de l’Église,
d’une part, et diversité, différences
et respect des initiatives locales, d’autre part.
Unité ne veut pas dire ‘uniformité’. Il est important de s’inspirer des communautés,
des fraternités comme celles de Cour-sur-Heure (2022) et, récemment, Buizingen, par exemple,
afin de comprendre ce qui y est en jeu.
Interpellation est faite aux évêques :
quelle peur est la leur en n’accueillant pas directement ces communautés ?
« Qu’exige un consensus universel durable… etc ? »
N’est-il pas indispensable de faire évoluer le droit canon
sur les droits et devoirs des conférences épiscopales ?
À propos du travail des évêques et du fait d’en « rendre compte au presbyterium et au peuple de Dieu », il serait bon de prévoir des processus de régulation avec un tiers pour accompagner,
soutenir en même temps qu ‘évaluer le travail des évêques.
Qui serait ce tiers pour mener ces entretiens?
B.- Trois thèmes pastoraux.
L’importance des priorités citées ci-dessus se traduit plus concrètement par trois thèmes qui sont fortement ressentis dans l’Église belge. Nous décrivons ces thèmes en relation avec les priorités susmentionnées.
1.- La place des femmes dans l’Église
- Qu’enseigne notre société ? L’égalité des sexes, l’importance de l’égalité des chances pour les hommes et les femmes. Ce ne sont pas des tendances à la mode. Ce sont des développements qui renforcent la compréhension du Nouveau Testament de l’égalité des hommes et des femmes en Christ.
- À la lumière de ces évolutions sociétales, nous relisons et renouvelons la Tradition/les traditions de notre Église. De plus en plus de femmes assument des responsabilités pastorales, y compris dans le cadre d’un ministère ecclésial reconnu (ministère). La question se pose de savoir si les femmes peuvent également être admises au ministère ordonné du diaconat.
- Nous demandons le feu vert pour que les conférences épiscopales ou les assemblées épiscopales continentales puissent prendre certaines mesures. Ainsi, l’attribution d’une responsabilité pastorale croissante aux femmes et l’ordination diaconale des femmes ne doivent pas être universellement obligatoires ou interdites.
Commentaires du C.I.L.
Remarque préalable : plutôt que de parler en dichotomie ‘homme/femme’, il serait plus opportun de parler de « l’égale dignité de toutes les personnes humaines … ou de toutes les personnes ».
Dans cette même logique, n’y a-t-il pas un paradoxe dans le fait de demander que les femmes puissent devenir diacres-diaconesses alors que les hommes peuvent devenir prêtres ?
La plupart des membres du C.I.L. pensent que la femme a souvent occupé une place centrale au sein de la pastorale locale mais que, jusqu’il y a peu, elle est restée longtemps absente des domaines de décision. De grandes avancées sont attendues bien sûr dans cette matière.
La question pointue se pose de savoir quand les femmes pourront-elles accéder au ministère presbytéral ? Quelles en sont les conditions aux yeux de l’Église ?
En outre, suggestion est aussi faite de concevoir à côté des prêtres, des ministres ‘ordonnés’, choisis et habilités, à court terme,
en lien avec la multitude des missions locales qui varient.
La plupart des membres pensent que l’égalité totale entre les hommes et les femmes dans l’Église est encore à prouver : il paraît évident que l’Église et ses communautés ont tout à gagner en manifestant une expérience plus équilibrée de la foi et de la mission en portant plus d’attention à ses dimensions féminines et masculines.
L’arrivée des femmes théologiennes et biblistes a déjà beaucoup enrichi la compréhension du message chrétien…
Y-a-t-il une raison théologique sérieuse pour différer cette égalité totale ?
Car il est urgent de mettre fin aux discriminations basées sur le genre dans l’attribution des responsabilités et des services au sein de l’Église catholique. À cet égard, l’exclusion des femmes est perçue par les laïcs et les laïques comme une injustice.
Mettre fin à ces discriminations devrait conduire à ouvrir aux femmes la voie vers l’ordination non seulement diaconale mais aussi presbytérale et, à plus longue échéance, épiscopale.
Dans ce sens, l’Église est appelée à modifier son regard et son message sur la sexualité car beaucoup de membres constatent que tout ce qui est lié à un regard d’un autre temps vis à vis de la femme n’a entrainé que de la discrimination.
Une autre question délicate se pose dès lors : pourquoi
la célébration de l’eucharistie est-elle exclusivement réservée aux seuls prêtres ?
Quel(s) argument(s) théologique(s) valable(s) peut-on avancer afin que toute personne catholique comprenne en profondeur et clarté cette situation ?
– Can 900, 907 ? –
À propos du diaconat ouvert aux femmes, n’y a-t-il pas un paradoxe avec l’histoire
qui a déjà connu des diaconesses dans le christianisme primitif ?
La demande, déjà faite par les évêques belges, de l’ouverture du diaconat dans le chef des femmes n’est-elle pas déjà acquise pour qu’il faille la voir à nouveau réitérée?
Sur la liste des thèmes abordés au Synode d’octobre 2024, un récent article du journal français La Croix (14.04.24) , repris par le site Cathobel, fait état d’un retrait éventuel de la discussion sur l’accès au diaconat fait aux femmes. Qu’en est-il vraiment?
À propos de la décentralisation, le C.I.L. adhère entièrement à cette proposition et estime que pour réaliser les réformes urgentes qui sont attendues, les assemblées des conférences épiscopales de chaque continent devraient avoir la possibilité de faire les choix adaptés à leur contexte. Dans le cas de l’Europe, mais aussi d’autres continents, ne faut-il pas envisager une approche par sous-continent (Europe de l’ouest) ?
2.- Place et signification du ministère ordonné dans une Église synodale.
- Que nous enseignent notre époque et notre culture ? La responsabilité pastorale n’est plus assumée uniquement par des prêtres et des diacres. Notre société a beaucoup de mal à assurer la relève cléricale du ministère ordonné. Même l’obligation du célibat pour les prêtres et les diacres qui deviennent veufs soulève depuis longtemps de vifs questionnements.
- À la lumière de ces évolutions, nous relisons et renouvelons notre Tradition/nos traditions d’Église. Nous ressentons la nécessité de redécouvrir la nature symbolique et sacramentelle du ministère ordonné. La relation entre le sacrement de l’ordination et la responsabilité pastorale (finale) requiert de nouvelles précisions. Nous demandons que les prêtres et les diacres assument de plus en plus de responsabilités pastorales au sein d’équipes dans lesquelles les laïcs ont aussi leur place et leur tâche. Nous voyons la nécessité de renouveler la formation des prêtres et des diacres pour qu’ils soient plus proches, plus à l’écoute et plus réceptifs sur le plan pastoral.
- Nous demandons que chaque conférence des évêques ou assemblée épiscopale continentale puisse prendre certaines mesures en vue de l’ordination sacerdotale des « viri probati ». L’ordination sacerdotale des « viri probati » ne doit pas être universellement obligatoire ou interdite.
Commentaires du C.I.L.
Le C.I.L. se réjouit des demandes des évêques, à propos de la relève cléricale du ministère ordonné, d’élargir l’espace à une créativité nouvelle. D’une part, les laïcs et laïques peuvent apporter une contribution beaucoup plus grande y compris décisionnelle dans la pastorale par le biais de ministères ecclésiaux reconnus ; d’autre part, le cléricalisme encore ambiant et stigmatisé par le Pape François, devrait, de cette manière, reculer de façon radicale grâce à une plus grande co-responsabilité et la mise en place de nouveaux modèles de participation à tous les niveaux y compris sacramentels.
Le C.I.L. recommande que des délégations sacramentelles puissent être instituées pour la célébration de certains sacrements : par exemple, dans le chef d’aumoniers/res en hôpital, de visiteurs/teuses de prison…
Quant à la formation, préalable à toute prise de responsabilité, est-on dans une logique de formation permanente ?
De même la proposition d’ordination des ‘viri probati’
pourrait-elle bénéficier d’une articulation plus précise des étapes envisagées ?
Les membres du C.I.L. se posent aussi la question du lien obligatoire entre le sacerdoce presbytéral et le célibat. Le célibat, pour toute personne, est humainement un choix personnel et devrait l’être également pour celui qui s’engage dans la prêtrise.
Mais qu’en serait-il du mariage des clercs déjà ordonnés ?
Cette question provocante paraît importante à certains membres du C.I.L.
Cet aspect de la question pourrait-il également être envisagé, dans un contexte de non-discrimination tout d’abord, et ensuite, parce que cela aurait le mérite, sans doute, d’éviter une certaine forme d’hypocrisie à propos des prêtres vivant aujourd’hui un amour ‘humain’ dans la clandestinité ?
3.- Les jeunes et la culture numérique
- Que voyons-nous autour de nous ? Les jeunes générations ont du mal à se connecter à la vie de l’Église. Ces dernières années, leur univers et la culture numérique se sont énormément développés, en particulier chez les jeunes. Cette nouvelle culture comporte des dangers et des limites, mais elle offre également de nombreuses opportunités pour annoncer la Bonne Nouvelle.
- Cette évolution nous incite à revoir et à renouveler la Tradition/les traditions de notre Église. Nous cherchons de nouvelles voies pour avancer avec des jeunes qui cherchent et qui croient. Nous sommes de plus en plus conscients que le numérique constitue un tournant comparable à celui que nous avons connu avec l’essor de l’imprimerie. Nous cherchons à investir davantage dans les personnes et les ressources qui témoignent de l’Évangile dans et à travers le monde numérique.
- Nous appelons à une forte solidarité (personnes, ressources, échange d’initiatives novatrices, etc.) entre les conférences des évêques et les assemblées épiscopales continentales afin que chaque Église locale bénéficie des opportunités nécessaires pour être présente dans le monde numérique.
Commentaires du C.I.L.
Les membres du C.I.L. font une remarque unanime et pertinente qui est à entendre : ce ne sont pas « les jeunes générations » qui ont à « se connecter à la vie de l’Église »… C’est l’Église qui doit aller vers les jeunes si elle veut les toucher en profondeur et en vérité. La démarche à faire est en sens inverse !
À propos de l’éducation des jeunes, demande est faite aux évêques de défendre le maintien et la préservation de l’enseignement des faits religieux dans la grille horaire des élèves ainsi qu’une formation adéquate et qualitative des enseignants dans toutes les écoles de Belgique ; mais surtout la préservation de la liberté, dans les écoles libres confessionnelles, d’organiser un cours de religion de deux heures par semaine, selon un contenu en phase avec notre société. Ceci, dans la perspective de préserver le dynamisme de la Démocratie et d’éviter un enseignement citoyen philosophique et confessionnel ‘standardisé’ au risque de le voir s’appauvrir intellectuellement.
Cependant, plusieurs membres du C.I.L. s’étonnent de l’approche restrictive de ce chapitre à propos de la culture des jeunes. Certes la culture numérique a changé bien des domaines de communication du point de vue des apprentissages et du témoignage. Néanmoins, la question à se poser ensemble en Église est : comment contribuer à l’éducation des jeunes ? Quel respect, quelle espérance annonce-t-on aux jeunes aujourd’hui ?
D’autres membres se demandent à quel point cette thématique des ‘jeunes et le numérique’ est prioritaire et centrale ? Le numérique est consommateur d’énergie et fait des dégâts à la planète. Il a également une incidence non négligeable sur la santé mentale. Alors, serait-ce une des seules réponses à donner à « faire Église autrement » ?
Ce thème ne devrait-il pas dépasser la question de « comment toucher les jeunes » ?
Car l’enjeu est de savoir comment aider les jeunes à vivre le message évangélique grâce et malgré la culture numérique ! Un autre enjeu est celui du lien humain : comment faire communauté avec les jeunes aujourd’hui ? Dans ce sens, l’outil numérique est un moyen mais est loin d’être le seul. Comment rappeler aux jeunes que l’amour est central dans le message de l’Évangile ?
L’ensemble des membres du C.I.L. croient fermement qu’il convient de s’interroger préalablement sur le sens à donner à la vie de la communauté. Il s’impose de revoir les ministères d’après les besoins réels et évangéliques de la vie de la communauté et en fonction de la culture dans laquelle elle est insérée. Dans le cas contraire, on n’aura fait que poursuivre une politique ‘palliative’ qui empêche de repenser la présence de l’Église dans la société changeante qui est la nôtre. C’est pourquoi le souci pour l’Église d’être présente dans la culture numérique et d’y rejoindre les jeunes ne peut qu’être encouragé dans un cadre concret, positif, créatif et en lien avec l’espérance de paix et de fraternité qu’attend la société.
CONCLUSION
Telle est l’espérance des laïcs de Belgique rassemblés, par leur association, au sein du C.I.L. :
les laïcs et les laïques souhaitent que l’Église retrouve un souffle neuf en s’ouvrant à un réel changement interne et à une annonce de l’Évangile dans une parole audible et vécue.
L’essentiel de la foi transmise réside dans la parole du Christ, dans l’eucharistie,
dans la prière et dans un désir de vie solidaire dans des chantiers renouvelés.
Associons les femmes aux décisions et à l’organisation ecclésiale,
mettant fin en cela aux discriminations sexistes.
Et les attentes sont à la hauteur des défis auxquels l’Église est confrontée.
Il n’est pas pensable que les différentes sensibilités exprimées au Synode
conduisent à convenir ‘d’un plus petit commun dénominateur’.
Les laïcs et les laïques sont prêts à devenir les acteurs d’une vie communautaire vivante,
dans une dynamique de co-responsabilité,
et sont prêts à agir pour une Église pauvre au service des pauvres et des exclus.
Le C.I.L. espère que le Synode 2024 conduise à une renaissance de l’Église :
une Église plus fraternelle et respectueuse de chacun.e des membres du peuple de Dieu
quelles que soient leurs différences,
femmes-hommes, laïcs, clercs, religieux-religieuses, nantis, pauvres et exclus.
Ont participé à cette réflexion, les membres du CIL suivants :
• ‘Agir en chrétiens informés’ (ACI) Isabelle Seny
• ‘Communautés de Base Wallonie-Bruxelles’ (CCB) Yvonne Mignot et Marie-Christine Terlinden-Snoy
• ‘Conférence des religieux et des religieuses en Belgique’ (COREB) Henri Aubert sj
• ‘Confédération des Syndicats Chrétiens Francophone’ (CSC) Pierre Xhonneux
• ‘Communauté de Vie Chrétienne Belgique’ (CVX) Denis Joassart sj
• ‘Eglise-Wallonie’ et ‘Fraternités Charles de Foucauld’ Henri Roberti
• ‘Entraide et Fraternité/Action Vivre Ensemble’ Anne Leblanc
• ‘Equipes Notre-Dame’ Brigitte et Hubert Wattelet
• ‘Justice et Paix’ Patrick Balemba
• ‘RivEspérance’ Philippe de Mûelenaere
• ‘Secrétariat Général de l’Enseignement Catholique’ (SeGEC) Marie-Eve Carton-Delcourt
• ‘Union Francophone des Associations de Parents de l’Enseignement Catholique’ (UFAPEC)
Bernard Hubien
• ‘Université de Namur’
• Conseillère théologique, Anne Ferier, Présidente du CIL, en collaboration avec le groupe « Femme et homme hier, aujourd’hui, demain«