Conférence-débat avec Catherine Chevalier, Marie de Lovinfosse et Marie-Clotilde Roose.

Dans le cadre de la démarche synodale initiée par le pape François, le CIL a approfondi la thématique de la place et du rôle de la femme dans l’Église.
La conférence a abordé trois aspects de cette thématique :

  1. Perspective ecclésiologique et pastorale : l’impact de hier sur aujourd’hui et l’espérance pour demain pour l’Église.
  2. Perspective biblique : la constante recherche de l’interprétation des Écritures.
  3. Perspective interreligieuse : le point de vue du dialogue interreligieux et les solidarités possibles sur la question de la relation entre hommes et femmes au sein des religions.

avec la participation de trois intervenantes :

Catherine Chevalier : rédactrice en chef de la revue Lumen Vitae. Docteure en théologie, Catherine Chevalier a une longue expérience en matière de formation en Église et est actuellement chargée de cours et formatrice, principalement auprès des agents pastoraux, au Centre universitaire de théologie pratique à l’UCLouvain. Ses dernières publications : avec Henri Derroitte, Directoire pour la catéchèse. Vademecum, Licap-Halewijn, 2021. Direction du dossier Lumen vitae « Où sont les femmes ? », 2022/3.

Marie de Lovinfosse : sœur de la Congrégation de Notre Dame de Montréal. (https://www1.cnd-m.org/fr). Exégète du Nouveau Testament (https://collegedominicain.academia.edu/MariedeLovinfosse); responsable du service biblique du diocèse de Liège (www.evechedeliege.be/bible ); attentive à la voix engagée des femmes en exégèse biblique (interreligieuse) et dans la vie ecclésiale. Quelques publications : La pédagogie de la « visite » de Dieu chez Luc (Études bibliques, Peters, 2018). Avec Emmanuel Durand, Naître et devenir- La vie conversante de Jésus selon Matthieu (Lire la Bible, Cerf, 2021). De quelques qualités et exigences d’une exégèse féminine et/ou féministe (Science et Esprit 73/3 (2021) 421-427).

Marie-Clotilde Roose : enseigne la philosophie en Faculté d’architecture (UCLouvain) à temps partiel. Dans le cadre de son travail pour Kairos (pastorale en enseignement supérieur), via le diocèse de Tournai, de 2017 à 2022, elle a suivi la formation EMOUNA au dialogue interreligieux. Mariée et mère d’un ado, elle s’investit dans les domaines de la spiritualité et de la culture (e.a. Le Cercle de la Rotonde). Dernières publications : l’essai Désir d’être et parole poétique (L’Harmattan, 2020), le recueil En minuscules (Le Taillis-Pré, 2023) et sa participation à l’ouvrage collectif Dans les sentiers de la Quête de la Joie. 35 écrivains à la rencontre de Patrice de la Tour du Pin, dir. Isabelle Renaud-Chamska, (L’herbe rouge, 2023).

Modérateur : Laurent Verpoorten, journaliste à RCF Liège

Un compte-rendu de cette conférence a été rédigé par les Communautés de Base Wallonie-Bruxelles :

Plusieurs questions ont été abordées : Quelles relations Jésus avait-il avec les femmes ? La misogynie n’est-elle pas une tendance lourde dans le christianisme ? L’égalité homme-femme existe-t-elle dans le Nouveau testament ? Y a-t-il une spécificité du christianisme, voire du catholicisme, quant à la place des femmes ? Quelles sont les nouvelles règles de la Curie concernant la place des femmes ? Y a-t-il un « plafond de vitrail » pour les femmes ? Qu’est-ce qui cloche encore entre les  hommes et les femmes dans l’Église ? 

Les trois intervenantes ont répondu à ces questions de manière personnelle.

Le Nouveau Testament, un processus d’ouverture à l’altérité  

Souvent accompagné de femmes, Jésus les regarde par-delà leur apparence physique. Marie-Madeleine exprime son besoin d’être sauvée, alors que les disciples n’ont pas vraiment compris de quoi il s’agissait. Ce sont encore elles qui annoncent la résurrection de Jésus, alors que leur place, à l’époque, était à la maison; message fort, s’il en est. L’épître de Saint Paul aux Galates donne aussi une place égale à tous et toutes : « Il n’y a plus ni Juifs, ni Grecs, il n’y a plus ni esclaves, ni hommes libres, il n’y a plus l’homme et la femme ; car tous, vous êtes un en Jésus Christ » (Galates 3, 28).

Jésus part des préjugés de son temps pour les renverser. L’Évangile de la Cananéenne montre, au départ, un Jésus imbibé des croyances de son temps. On le voit d’abord se confronter avec la Cananéenne, puis un processus d’écoute se met en place pour aboutir à une posture d’accueil (Matthieu 15,22). Les identités particulières continuent pourtant d’exister dans certaines lettres pauliniennes, par exemple dans l’épître aux Éphésiens. Dans les premières communautés chrétiennes, différents ministères sont confiés aux femmes. Elles peuvent même être diacres. 

…qui n’aboutit pas…                                                               

Au cours du premier millénaire, le focus se porte de plus en plus sur l’homme.  Et en 1140, le « Decretum Gratiani », rassemblant les textes fondateurs du droit canon, interdit le diaconat aux femmes et se concentre sur le célibat des prêtres.

Mais un virage s’amorce …                 

Vatican II crée, en 1963, une certaine diversité sacerdotale (sacerdoce ministériel et sacerdoce commun des fidèles) mais le pouvoir sacré reste dévolu aux hommes. On reste encore loin d’une Église pluri-ministérielle.

Le synode des évêques en Amazonie en 2019 a ouvert des ministères aux femmes, mais a réservé la présidence de l’eucharistie aux hommes.   

Mais quels seraient les chemins à prendre ? 

Le principal objectif, pour nos conférencières, n’est pas l’ordination des femmes, mais faire évoluer la situation ecclésiale dont on a hérité. Un travail plus en profondeur est nécessaire. Il nous faut donner la priorité à l’annonce de la Bonne Nouvelle. Au cours des siècles, on a donné de plus en plus d’importance à la célébration de l’eucharistie. On a inversé les choses.    

Pourquoi avoir peur de l’altérité ? Comment gérer la différence sexuelle autrement que par la domination ? Il n’y a pas de qualité ou de défaut spécifique à l’homme ou à la femme. Elles et ils ont un point commun : appartenir au genre humain. Un véritable chemin de conversion nous est proposé. Se mettre ensemble à une véritable écoute, oser le vis-à-vis, apprendre à parler à l’autre comme à « un vis-à-vis », sans le mettre dans une catégorie. Comme il serait intéressant de prendre ce chemin d’accueil de l’altérité et de l’égale dignité de chacun.e qui nous mènerait à une pluralité des ministères au service de la vie. Ce combat nous concerne tous et toutes.

Yvonne Mignot et Marie-Christine Terlinden-Snoy

Catégories : Conférences